L’impression 3D utilisée pour le médical

Par Guillaume Promé
le
5 Fév. 2018 Innovation

impression-3d-dispositifs-medicaux-fullTechnologie(s) en phase de maturation l’impression 3D séduit le monde du médical : flexible et rapide ce procédé de fabrication additive inspire fabricants et utilisateurs. Mais le périmètre règlementaire est très limite et les prises de bec vont s’enchainer pour savoir qui du fabricant ou de l’utilisateur est responsable des dispositifs imprimés.

Vous trouverez dans cet article une présentation en image d’utilisations de l’impression 3D dans le médical, la suite est consacrée au contexte règlementaire, en tenant compte du règlement relatif aux dispositifs médicaux et des premiers retours terrain.
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Quand l’impression 3D pénètre le médical

Quelques exemples d’utilisation de l’impression 3D à des fins médicales, par ordre de wow personnel :

seringue-impression-3Dstethoscopeotoscopepetits instruments chirurgicauxpetits instruments chirurgicauxgouttière dentairedentiercouronne et implant dentaireplatreprothese brasfacegreffe-visagecœurcrane

On peut dessiner quatre grandes familles d’applications médicales :

  • Impression de petits dispositifs: ancillaires, seringue, instruments chirurgicaux… Le rêve des utilisateurs, imaginez un hôpital avec une imprimante 3D embarquant les modèles de dizaines de milliers de dispositifs, finies les niches inaccessibles, tout est disponible, immédiatement. On pourra même recycler les dispositifs pour en imprimer des nouveaux.
  • Impression de dispositifs sur-mesure : prothèses, orthèses, dentaire, greffes… l’impression 3D est flexible, le sur-mesure devient accessible.
  • Impression d’une partie de l’anatomie d’un patient, pour entrainement : la possibilité de reproduire à l’exact une partie anatomique en utilisant la force de l’imagerie permet d’exercer un médecin avant un acte réel.
  • Bio impression : tête, oreille, bouche ou nez… surement un abus de parler d’impression 3D, en tout cas les technologies font rêver.

 

place aux différents contextes règlementaires associés à l’impression 3D pour des fins médicales.

attention : ce sont des interprétations personnelles, l’impression 3D va faire couleur beaucoup d’encre…

🎓 Impression de parties anatomiques pour entrainement

C’est le créneau de la société française Biomodex qui propose, entre autre, l’impression d’un système vasculaire pour entrainement à la pose de stents.

Utilisation dans le cadre d’une formation

Formation initiale d’un étudiant ou formation continue d’un chirurgien ici la santé d’un patient n’est pas en jeux : ainsi le produit imprimé n’est pas un dispositif médical.

Utilisation pour un entrainement en pré-opératoire

Pour répéter un geste difficile sur une partie anatomique complexe (cas récent : préparation d’une intervention sur une malformation cardiaque chez un enfant).

Le cas est assez compliqué, l’objet imprimé est à deux doigts d’être un DM (utilisé pour traiter une maladie ou investiguer sur une partie anatomique, par exemple) mais nous sommes en zone grise et ce sont les revendications du fabricant de l’imprimante qui vont faire pencher la balance, comme expliqué dans le cas suivant.

L’entrainement fait partie de l’utilisation normale du DM

Un axe fort de développement de l’impression 3D : un fabricant de dispositifs médicaux propose aux utilisateurs un système d’impression pour qu’ils puissent s’entrainer à choisir / poser / dimensionner /… les dispositifs en catalogue.

Ici l’impression 3D est nécessaire pour permettre l’utilisation prévue du DM, elle porte les performances cliniques, elle améliore l’aptitude à l’utilisation, elle constitue un accessoire de DM soumis à la réglemention.

Notez que le fabricant du DM et le fabricant de l’imprimante seront, vraisemblablement, différents (les technos n’ont rien à voir) mais devront collaborer : les caractéristiques de l’impression (résistance, élasticité, état de surface…) impacteront l’entrainement et donc l’acte médical.

🏭 Impression de dispositifs médicaux, par un fabricant

Le cas le plus simple : le produit est un dispositif médical comme les autres, l’impression 3D n’est qu’un procédé de fabrication comme un autre, le fabricant qualifie le procédé ou effectue le contrôle final de chaque dispositif.

Le dossier technique démontre la conformité des produits fabriqués, en décrivant le procédé de fabrication et les validations.

👤 Impression de dispositifs médicaux, par l’utilisateur

Une petite révolution, le concept : des fabricants de dispositifs médicaux mettent à disposition des établissements de santé :

  • une imprimante,
  • ses consommables,
  • des modèles 3D de dispositifs médicaux, et
  • une prestation de contrôle et maintenance de la machine.

En imprimant un DM l’utilisateur “passe commande”, l’imprimante court-circuite toute la chaine de distribution.

Et le dispositif reste un dispositif médical sous la responsabilité de son fabricant (légal, pas celui qui appuie sur le bouton imprimer). Le service peut même tenir compte des contraintes du règlement DM en termes d’identifiant unique, d’enregistrements, de matérioviglance… de façon automatisée.

🏥 Cas particulier : impression 3D dans un établissement de santé

L’occasion de parler de l’article 5.5 du règlement, les établissements de santé peuvent imprimer des DM et échapper au marquage CE si :

  • le dispositif est utilisé exclusivement dans l’établissement
  • il n’y aura pas de transfert du produit vers un fabricant
  • l’établissement de santé a un joli système qualité (idéalement une ISO 13485 light)
  • l’impossibilité de répondre aux besoins des patients avec un DM du commerce est démontrée
  • l’établissement de santé a établi une documentation technique contenant les éléments sur :
    • les réponses aux exigences générales de performance et sécurité (annexe I)
    • la maitrise de la fabrication
    • la surveillance clinique après commercialisation

En gros : la même chose que pour les fabricants, l’organisme notifié en moins. Et c’est souvent injouable. Mais personne ne devrait trop  contrôler.

Si cela n’est pas respecté il reste trois possibilités pour l’établissement :

  1. faire une croix sur l’utilisation de l’impression 3D
  2. devenir fabricant de DM
  3. travailler avec un fabricant de DM (voir le cas 3)

📐 Cas particulier : les dispositifs sur mesure

Le statut est complexe, la littérature abonde :

[ANSM] FAQ – modalités de mise sur le marché des dispositifs médicaux sur mesure 25/06/2012
[ANSM] GUIDE – Mise sur le marché des DM sur mesure – dentaire 07/05/2012
[ANSM] GUIDE – Mise sur le marché des DM sur mesure 07/05/2012
[UE] GUIDE – Dispositifs médicaux sur mesure 11/11/2009

Le nouveau règlement DM a sa propre définition :

dispositif sur mesure

tout dispositif :
– fabriqué expressément suivant la prescription écrite de toute personne habilitée, et
destiné à n’être utilisé que pour un patient

En revanche, ne sont pas considérés comme des dispositifs sur mesure :
– dispositifs fabriqués en série qui nécessitent une adaptation pour répondre aux exigences particulières de tout utilisateur professionnel,
– dispositifs sont produits en série par des procédés de fabrication industriels suivant les prescriptions écrites de toute personne habilitée

La notion de “fabriqué en série” n’est malheureusement pas définie, mais elle tourne vraisemblablement autour de l’idée d’un procédé de fabrication automatisé, tout à fait applicable à l’impression 3D qui ne doit donc pas systématiquement tomber dans le dispositif sur mesure.

Conclusion

Avec des critères règlementaires qui mélangent technologies et finalités et des niches dans le sur-mesure et l’hospitalier : le cas de l’impression 3D n’a pas fini d’être débattu, mais les bénéfices sont là et le secteur ne devrait pas résister longtemps.